World’s End Club, le Visual novel de votre été
Seuls quelques grands noms du jeu vidéo peuvent vendre à eux seuls une nouvelle licence. Et encore : on l’a vu avec le semi-bide Death Stranding (désolé, Hideo Kojima), ce n’est même plus une évidence. S’il est moins populaire que les créateurs les plus starifiés, Kazutaka Kodaka est un véritable maître du Visual novel, et l’on attendait tous son nouvel univers après nous avoir tant passionné avec Danganronpa. Alors, World’s End Club parvient-il à se démarquer ? Oh que oui.
On a cité Kazutaka Kodaka, mais un autre grand nom du Visual novel est de la partie : Kotaro Uchikoshi, que vous connaissez sûrement pour Steins;Gate. Une dream team donc, réunie dans le studio Too Kyo Games (et édité par NIS Anerica), laquelle nous propose un cheminement que l’on a pris grand plaisir à parcourir. Cela ne surprendra personne, World’s End Club met le paquet sur son scénario, ses personnages et son atmosphère. Et, quelle bonne nouvelle, le soft est entièrement sous-titré en français (avec la possibilité de choisir le doublage japonais, merveilleux !). C’est une excellente chose, car les dialogues sont nombreux et importants, et cette aventure nécessite la compréhension totale de la part des joueurs.
Difficile d’aborder tout cela en profondeur car, écrivons-le clairement, le risque de spoiler pointe le bout de son nez. World’s End Club joue avec les attentes des joueurs, et aime plus que tout les retourner contre eux. Les deux auteurs savent que leurs noms impliquent une certaine ambiance, et même des genres particuliers. Danganronpa, c’était de la survie dans une sorte de Battle Royale textuel bien glauque. Steins;Gate, c’était de la grosse science-fiction à base de théorie des lignes d’univers. On retrouve le jeu de survie et la SF, mais aucun d’eux comme on les attendait, et même dans une utilisation carrément contraire en terme de thématiques. On n’en dira pas plus.
Les auteurs jouent habilement avec nos attentes
Il faut tout de même préciser que World’s End Club débute, justement, un peu comme le film Battle Royale, de Kinji Fukusaku. Un bus, une classe de jeunes écoliers de primaire qui va se retrouver confrontée à l’adversité la plus meurtrière. Celle-ci prend la forme d’un jeu pratiqué en groupe, le Club des Battants. Les règles sont détaillées par Pielope, une sorte de pantin dont le concept profond dont le rôle pourra rappeler celui de Monokuma. Danganronpa n’est jamais bien loin. Il sera question de ne surtout pas laisser l’un des élèves accomplir sa mission (qu’il ne connait pas), sinon tous les autres meurent. Aussi, chacun peut se faire réduire en chair à saucisse s’il voit son objectif être définitivement perdu.
On se dit alors que World’s End Club est assez classique, mais efficace. Entre les dialogues, on a droit à des phases de plates-formes en 2,5D, un peu molles mais tout de même plaisante tant elles permettent de souffler. Surtout, on a droit à quelques petites énigmes assez simples, comme ce court-circuit à créer. Plus dur, il faudra deviner un code à partir d’un indice très mince, attendez-vous à bloquer un peu. Bref, il s’installe assez vite un train-train un peu convenu, même si l’on prend du plaisir. Et là vient le rebondissement qui lance vraiment l’expérience. La fin de ce jeu de survie n’est en fait que le début de l’aventure, laquelle prend la forme d’un road trip à travers un japon post-apocalyptique que l’on découvrira via des points d’intérêt sur une map.
C’est alors que World’s End Club gagne énormément en personnalité, en allant là où on ne l’attendait pas. Une fois sorti du premier environnement, une sorte de parc aquatique de l’angoisse, une structure se met en place. Elle est en plusieurs temps : l’histoire bien entendu, mais aussi les camps pour découvrir les subtilités des personnages et l’action toujours en 2,5D. Le rythme est intéressant pour un Visual novel, on n’a jamais l’impression de faire du surplace même si la principale mécanique du soft reste la lecture. D’ailleurs, s’en plaindre serait totalement ubuesque, c’est le genre qui impose cela.
Les phases de plates-formes plus agréables qu’espéré
On avait un peu peur pour les phases de plates-formes, donc les sensations restent tout de même assez flottantes même si précises au possible. Cela s’arrange au fur et à mesure, et l’on pourra même parler d’une certaine profondeur, ce qu’on n’avait pas vu venir. Si les premiers instants passés avec World’s End Club nous font penser que l’avatar sera uniquement Reycho, dont le design rappelle beaucoup celui d’un chasseur de Pokémon, il n’en est rien. Il sera possible d’incarner d’autres élèves, et ce n’est pas pour rien : chacun a droit à un pouvoir spécial, comme par exemple balancer une boule de feu. Et cela a une importance pour se tirer de certains passages. On pourra aussi collectionner des autocollants, parfois bien cachés ou atteignables en ayant rempli certaines condition.
La durée de vie se situe autour de la douzaine d’heures, et un peu plus pour qui veut tout voir, ce qui devrait être le cas de tout le monde. World’s End Club propose pas mal de choix à conséquences, et celles-ci sont assez importantes, avec de vrais impacts sur l’aventure et des personnages de plus en plus attachants. Tout pour qu’on ait envie d’y revenir. Techniquement, le jeu se tient plutôt bien, même si l’on conseille de jouer en nomade afin de moins remarquer des textures parfois pauvres. Bon, au moins la fluidité est assurée, une bonne chose. La direction artistique est quelques crans en-dessous de celle d’un Danganronpa, et globalement la tonalité se fait moins (voire pas du tout) sanglante. On est plus dans un trip enfantin, mais pas naïf non plus, avec un vrai travail sur le character design. Enfin, la musique est inégale, mais est capable de grosses envolées soulignant parfaitement une angoisse flottante presque constamment dans l’air.