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Deathloop – Test – PlayStation 5

image jeu deathloop

Deathloop, aussi généreux que chaotique

On ne va pas le cacher : l’acquisition de Zenimax / Bethesda par Microsoft ne nous a pas forcément enjoué. Car, dans cette folle affaire, on voit surtout quelques studios de qualité se couper d’une très grande partie des joueurs console. On pense notamment à Arkane, l’entité née à Lyon et auteure de jeux parmi les plus marquants de ces dernières années (les Dishonored, l’excellent Prey). Bon, pour le moment on va surtout savourer cette ultime sortie globale, avec un Deathloop sympathique mais, comme toute chose en ce monde, imparfait.

Cela fait quelques années que le jeu vidéo s’attaque au concept de boucle temporelle, comme pour accompagner le principe de la « boucle de gameplay ». Cela n’est sûrement pas étranger au succès d’un certain genre, très usité par le milieu indépendant : le Roguelite. Avant de rentrer de plein pied dans l’histoire et la prise en mains de Deathloop, il est bon de préciser un peu le caractère de celui-ci, car la phase de découverte du titre, depuis son annonce, n’a pas toujours été claire, préférant étrangement miser sur l’ambiance, la direction artistique, que sur le concept. Alors, est-on sur une expérience qui se rapprocherait de Returnal ou de Hades ? Beaucoup d’éléments paraît l’en éloigner, notamment dans une difficulté moins marquée (comptez tout de même sur un challenge un peu présent), mais il est indéniable que le jeu d’Arkane s’inspire grandement de cette structure demandant un nouveau départ plus ou moins « à poil ». Le débat a fait rage sur les internets, et l’on peut comprendre car c’est en jouant que l’on découvre les spécificités, mais pour nous cela ne fait aucun doute : le soft comprend des caractéristiques du Roguelite, sans s’y borner pour autant.

D’ailleurs, cela ne pouvait en être autrement à la vue de l’histoire. Deathloop est une sorte de Jour Sans Fin (ou de Timecrimes, pour les fins connaisseurs) qui aurait rencontré une direction artistique très sixties. La boucle temporelle est donc de mise, mais aussi cette tonalité un peu cool… du moins dans son aspect artistique. Car l’histoire, elle, se fait plus sombre que ce qu’on attendait, ce qui n’est pas un mal. Le joueur incarne Colt, un homme au passé aussi diffus que ses souvenirs. Alors qu’il se réveille sur le sable d’une horrible plage de l’île de Blackreef, il se rend compte que sa mémoire flanche gravement. Aucun souvenir, rien, le voilà échoué sans trop savoir pourquoi. Et vous l’avez sans doute compris, il va falloir découvrir le pourquoi du comment de tout ce bordel, tout en découvrant un talent naturel très poussé pour le tir à l’arme et l’utilisation de pouvoirs. Oui, ça sent la recette Arkane à des kilomètres.

Un jeu intelligent, une fois la prise en mains digérée

Observez bien les déplacements des ennemis.

Bien vite, on s’aperçoit que Colt a une liberté limitée en terme de temporalité. Soit il se fait tuer (plusieurs fois, le jeu est généreux à ce niveau), soit la journée se termine. Dans les deux cas, le voilà réveillé sur la plage, et rebelote non sans avoir acquis pas mal de connaissances. Nous ne rentrerons pas dans le développement du récit, plus fin qu’espéré et surtout sujet aux rebondissements. Mais sachez tout de même qu’Arkane a particulièrement bien réussit ses antagonistes. En effet, il va falloir buter les huit Visionnaires, les boss de Blackreef tous plus cinglés et charismatiques les uns que les autres. Mais la palme revient à la très accrocheuse Julianna, l’une des excellentes idées de ce jeu. En solo, elle apparaîtra afin de nous foutre dans la panade, en s’aidant notamment d’un pouvoir de caméléon : elle peut ressembler à n’importe quel PNJ et vous abattre froidement. Heureusement, son invasion dans votre partie sera signalée, ne vous en faites pas. Aussi, et c’est là que ça devient aussi vicieux que fun, la jeune femme peut être contrôlée par un autre joueur, ou par vous même bien entendu. De quoi rire cruellement en allant saborder l’univers d’autres gamers.

Deathloop, c’est un peu Dishonored avec des flingues, des gros mots, et un game design moins bien cadré. La prise en mains est difficilement digérée, tant le concept met du temps à réellement se former, en passant par une phase d’apprentissage un peu bordélique. On expérimente, on débarque dans les quartiers de l’île, on découvre que ceux-ci sont complètement différents selon les moments de la journée (avec quatre plages horaires), on rage un peu aux premiers échecs. Surtout, on ne comprend pas trop, de prime abord, où veut en venir Arkane, car il semble clairement impossible de faire trépasser les huit Visionnaires sur une seule journée. Et voilà, eurêka, c’est ça le principe même de l’expérience : un gigantesque casse-tête meurtrier nous demandant de connaitre sur le bout des doigts non seulement les lieux mais aussi l’activité des PNJ. Oui, ça sent Shenmue et autres Majora’s Mask, mais auxquels on a appliqué un système de quête plus scénarisées, des pouvoirs, de l’infiltration, etc. C’est très entêtant quand on a digéré la recette, par contre cela pourra aussi laissé pantois bon nombre de joueurs qui apprécient la clarté plus que l’expérimentation.

Les combats sont très nerveux.

Deathloop est un paradoxe : sa substantifique moelle est plutôt simple, mais ses tergiversions complexifient parfois un peu trop le trip, et finissent même par désamorcer une partie des sensations. Par exemple, l’idée du résiduum est excellente : il s’agit d’une ressource que l’on récupère sur le terrain ou en tuant les Visionnaires. Elle sert à sauver des éléments importants lors de nos échecs (breloques, armes, etc). Très bien, mais cela vient aussi un peu contrecarrer le frisson de l’échec, déjà mis à mal par une compétence permettant jusqu’à trois morts par run. Aussi, et surtout, le titre provoque autant la joie de la découverte que la frustration du jeu terminé sur lequel on ne reviendra pas forcément. En effet, le générique de fin signifie l’arrêt brutal de l’expérience et, pour le moment, seule le mode invasion de Julianna nous pousse un peu à y revenir, sans grand entrain. C’est quand même dommage pour un jeu misant énormément sur son environnement, sa connaissance, et son indéniable qualité de level design.

Il vous faudra une quinzaine d’heures afin de venir à bout de la journée de Colt. Cette durée de vie, qui peut gonfler jusqu’à la trentaine pour qui veut tout voir et tout débloquer (dont les Trophées), serait un point négatif pour un pur Roguelite. Ici… ça passe. Peut-être aussi parce qu’une partie de l’ambiance devient assez répétitive dans la dernière ligne droite. Enfin, le visuel de Deathloop souffle le chaud et le froid. La direction artistique est top, rien à redire même si certaines couleurs trop flashy donnent un côté vulgaire à certains endroits. Par contre, et malgré une première mise à jour ayant bien revu à la hausse l’intelligence artificielle, le jeu est parfois étonnant de suffisance au niveau purement technique. Les ennemis sont d’ailleurs au centre de cette remontrance : leurs animations font clairement datées, et certains comportements restent si whatthefuckesque que cela nous sort du trip. On a même relevé des baisses de framerate, alors même que les textures ne sont pas des plus complexes. Sur PlayStation 5, on peut choisir entre trois modes d’affichage. Performance pour favoriser le duo 4K / 60fps, Qualité dont la 4K dynamique fait parfois toussoter la fluidité.Le dernier, Raytracing, ajoute donc l’effet de réverbération, en provoquant un 30fps pas fameux. Enfin, la musique joue un grand rôle dans l’ambiance typique des films d’exploitation sixties. Les doublages, eux aussi, sont de grande qualité.

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