Tails of Iron est aussi beau que brutal
On le signalait dans notre test de KeyWe : la rentrée de septembre est toujours si chargée qu’elle a tendance à écraser les jeux d’ampleur plus humbles que les grosses productions. Heureusement, tout comme pour les valeureux kiwis, on peut compter sur Just For Games pour distribuer physiquement, donc mettre en avant, des sorties moins évidentes. C’est le cas avec Tailes of Iron, Action-RPG 2D aux évidentes qualités.
En bon A-RPG, Tails of Iron se devait d’instaurer un univers accrocheur. Et, bonne nouvelle, c’est ce qu’il fait avec un certain talent. Conté par la voix de Doug Cockle (un habitué du doublage, entendu dans The Witcher 3 et Desperados III), le contexte mélange la fantasy parfois dark, en tout cas violente graphiquement, et personnages anthropomorphes. Game of Thrones qui rencontrerait La Ferme Des Animaux ? On n’ira pas jusque là, mais il est question d’un conflit larvé depuis des années entre deux clans : le Royaume des valeureux Rats et celui des vicieuses Grenouilles. Après une victoire arrachée par le roi Rattus, les rongeurs ont pu profiter d’une période de prospérité. Seulement voilà, le souverain est au crépuscule de sa vie, et les sanglants batraciens en profitent pour revenir à la charge…
C’est ici que le joueur intervient, dans le rôle de celui sur qui l’avenir repose : Redgi, fils de Rattus et désormais roi. Visiblement, ses épaules sont moins larges, mais son potentiel reste exceptionnel. Cela tombe bien, on parle du votre, par le biais du skill que vous allez travailler. Comme on le voit, le récit de Tails of Iron (entièrement sous-titré en français) colle finement à ce qu’on attend d’un A-RPG : une motivation pour progresser toujours plus. Bon, on est un peu moins fan de la forme des dialogues entre personnages, qui s’expriment par images et petits bruitages faisant passer ceux de Banjo-Kazooie pour de douces mélodies. Rien de bien grave, et cette forme d’écriture a au moins le mérite de titiller l’attention.
Un univers soigné, aidé par une 2D mémorable
Tails of Iron peut donc compter sur un monde solide, doublé d’une direction artistique hyper efficace. Cette 2D, toute architecturée à la main, a de quoi devenir mémorable. C’est bourré de détails, et qui veut bien y être attentif multipliera sa maitrise de l’univers. Enfin, il faudra tout de même faire attention à rester vigilant, car ce qui se passe à l’écran n’est pas non plus de l’ordre du contemplatif. Pour vous signifier un peu où vous pointez la moustache, sachez que les développeurs d’Odd Bug Studio (jusqu’ici connus pour un timide The Lost Bear, plus porté sur la narration) présente leur bébé comme un A-RPG en 2D de type Souls-like, avec tendance Metroidvania. Bon, la recette est archi-usitée, mais cela vous met sur la voie concernant la prise en mains. Et, effectivement, il faut s’attendre à une difficulté marquée.
Tails of Iron expose rapidement son gameplay. Et il faut bien dire qu’il ne propose rien de bien neuf, ce qui n’annihile pas ses forces. C’est dans l’immense château de son père que la phase d’apprentissage se déroule, avec une belle fluidité. Redgi frappe, peut charger un coup, effectue un dash, une roulade, utilise son bouclier non seulement pour se protéger mais aussi contre-attaquer. Aussi, notre rongeur va devoir gérer son équipement, une grosse partie de votre réussite se trouve là. Si l’on débute avec une petite lame à une main, on pourra bientôt opter pour des choses plus imposantes, comme une bonne grosse hache, et même des armes à distance. Cela va bien évidemment changer l’approche des combats qui, tout de même, gardent toujours cette qualité exigeante : vous ne pourrez pas vous contenter de rentrer dans le lard. Surtout que le bestiaire s’étoffe (notamment avec des zombies et des mouches de la mort), propose des boss bien énervés, et ne fait aucun cadeau.
Pas de panique (enfin si, un peu quand même), Redgi pourra se soigner en puisant dans une gourde à remplir dès que possible. Mais tout de même, on insiste sur la priorité à donner à la défense. Pour cela, il faudra observer très attentivement les patterns, mais aussi l’apparence des ennemis. Car un signal de couleur, sur leur skin, signifie une attaque d’un certain type. Celle-ci induit évidemment un réflexe de la part du joueur, dans une mécanique de pierre-feuille-ciseaux désormais bien connue. On ne placera pas une défense au bouclier sur un coup chargé de l’adversaire, mais une roulade. Prudence est de mise. Tails of Iron peut aussi compter sur des sensations de combat très soignées, brutales au possible. On sent puissamment les impacts, qu’ils soient infligés ou reçus, ce qui décuple le sentiment de puissance. Il est simplement dommage qu’aucune originalité ne vienne un peu gonfler ce constat, mais on comprend aussi qu’un jeune studio s’attache d’abord à assurer l’essentiel.
Un petit manque d’originalité dans le gameplay
Tails of Iron se devait donc de pousser sur les autres aspect afin d’apporter un autre souffle. Hélas, ce n’est pas vraiment le cas, ce qui empêche le résultat d’atteindre des sommets encore plus hauts perchés. L’aspect RPG est finalement réduit à son strict minimum : la progression par l’équipement. Celui-ci s’obtiendra grâce à des plans (donc du bon gros craft), en étant récupéré sur des cadavres ou en récompense de quêtes. Aussi, le côté Metroidvania se contente de proposer du backtracking classique, mais peu de secrets, voire aucun endroit que l’on ne finira pas par découvrir pour une quête secondaire. C’est dommage. Par contre, signalons ici une carte exemplaire, qu’on prend plaisir à compulser. Plus satisfaisant, il va falloir amasser de la pièce d’or afin d’aider notre fidèle serviteur à reconstruire le château. Une impression d’évolution de l’univers intéressante, même si l’impact sur le gameplay reste limité.
Tails of Iron a la bonne idée de ne pas trop allonger artificiellement sa durée de vie. On pourra tout de même se lancer dans la collecte de quelques statues cachées, mais rien d’abusif. On fait le tour de l’aventure en sept à huit heures, selon votre skill (et votre résistance face à ce rogntudju de dernier boss) et en comptant les quêtes secondaires. Techniquement, le jeu est tout simplement grandiose. On découvre là de la 2D comme on les aime, bourrée de détails. Chacun des six environnements propose une multitude de pièces, et toutes apportent des éléments précis qui les différencient, c’est sublime. Aussi, ça grouille d’animations, que ce soit sur notre plan ou à l’arrière. Vraiment, du grand spectacle. Pour confirmer ce résultat haut de gamme, l’ambiance sonore n’est pas en reste. C’est à jouer au casque : vous percevrez le moindre bruitage, mixé à la perfection notamment dans la gestion de la distance. Et la musique est top, pour ne rien gâcher.