Greak : Memories of Azur, charmant mais prudent
Le jeu vidéo indépendant est finalement devenu comme une industrie à l’intérieur de l’industrie. Avec ses habitudes, ses automatismes, ses cercles plus ou moins fermés, ses genres particulièrement abordés. Parmi ceux-ci, les aventures en 2D sont évidemment monnaie courante, pour d’évidentes raisons financières : ces softs sont bien moins chers à produire. Les joueurs y ont trouvé leur compte, et des éditeurs un peu plus costauds, comme Team17, le savent bien. L’entité nous propose donc Greak : Memories of Azure, un titre issu du tout nouveau studio mexicain Navegante Entertainment.
Navegante Entertainment est une jeune structure, Greak : Memories of Azure est leur tout premier travail. On le voit fréquemment, il s’agit d’un exercice difficile pour un studio, aussi talentueux soit-il, car cela demande de la prudence. Et la frontière s’avère fine entre celle-ci et le classicisme, plus problématique selon les genres abordés. Le titre évite certains pièges côté gameplay (et tombe en plein dedans sur d’autres, comme nous le verrons plus bas), par contre l’histoire se révèle peut-être un poil trop convenue. L’action se déroule dans le monde d’Azur, où deux camps se font antagonistes : les paisibles Courines et les belligérants Ulrags. Les premiers sont de véritables défenseurs de la nature, tandis que les seconds assoient leur domination en piétinant toute idée écolo. Qui est gentil, qui est méchant ? Vous connaissez la réponse.
Les Courines tentent alors de fuir cette emprise violente, et c’est précisément ici que rentre en scène Greak. Notre petit avatar va devoir partir à l’aventure pour retrouver son frère et sa sœur, tous deux disparus, ce qui va le pousser à rencontrer un camp de rescapés. Il va alors comprendre que sa quête est double : rechercher sa famille, mais aussi aider les survivants à se construire un vaisseau afin de quitter cette partie du monde. Bon, ce n’est donc pas avec ce scénario que l’on sera surpris, mais il nous faut souligner la belle qualité de narration. Greak : Memories of Azur trouve le bon équilibre entre ce qui doit être ressenti pendant les phases de gameplay, et ce qui doit être raconté lors de cinématiques animées très mignonnes. Du coup, on reste tout de même assez séduit pour suivre le récit avec intérêt. Surtout que les sous-titres sont proposés en français.
Le gameplay est globalement satisfaisant, mais manque de finition
Une histoire sans grands rebondissements mais attachante, et le gameplay alors ? Tout d’abord, il faut préciser que Greak : Memories of Azur n’est pas un platformer, mais plutôt un jeu d’aventure en 2D, avec une bonne dose de réflexion et de l’action. Le cheminement se fait en venant à bout des ennemis et d’énigmes proposées dans les zones traversées, ce qui imprime un rythme bien différent du genre de la plate-forme. Et ce même si certains passages vont vous demander de la précision dans les sauts. L’histoire joue aussi un rôle dans la prise en mains. Ainsi, Greak est notre avatar unique en début de quête. Il maitrise une épée, une arbalète, et peut effectuer un double saut. Par contre, il n’est pas du tout à l’aise dans l’eau, et l’on remarque que cela a des conséquence sur l’exploration.
Voilà tout l’intérêt de retrouver sa sœur, Adara, dont les capacités de déplacement nous ouvrent de nouvelles voies. Elle peut flotter dans les airs (coucou princesse Peach), mais aussi bien mieux nager. Par contre, elle se fait moins efficace dans les combats, alors veillez à bien alterner entre les personnages. Et ce n’est pas tout, puisque un troisième larron rejoint l’aventure : le frère, Raydel. Lui aussi apporte une nouvelle capacité : un grappin, permettant là encore d’atteindre des endroits autrement inatteignables. Aussi, il est certes plus lents que le héros, mais sa lame se révèle bien plus dévastatrice. Greak : Memories of Azur pourrait faire penser à un Metroidvania, mais ce n’est pas réellement le cas. Le jeu nous propose un village, en fait un hub dans lequel on se voit confier des missions par les habitants, avec aussi des activités annexes, peu nombreuses et pas bien écrites (dommage) mais rémunératrices en objets bonus importants. Du coup, on ne peut pas réellement parler de backtracking, ni de codes rappelant par exemple les Castlevania de la Game Boy Advance.
Un univers enchanteur, superbe direction artistique
Le game design de Greak : Memories of Azur est donc à l’image de son histoire : rien de bien palpitant, pas d’originalités, mais ça fait le café. Et la crème alors ? Là, c’est plus discutable en terme de finitions dans la prise en mains. Les combats ont parfois de quoi nous faire un peu rager. Certes, l’on comprend le besoin de souligner l’infériorité physique de Greak face aux Ulrags. Mais tout de même, on aurait aimé une allonge un peu plus efficace, cela afin d’éviter de devoir trop rentrer au contact. Adara est trop déséquilibrée avec ses attaques à distance, certes brimées par une jauge mais elle reste tout de même bien facilitée par cette capacité. Mais le pire reste Raydel. On apprécie bien mieux son équilibre, avec sa puissance et sa très bonne défense (à l’aide d’un bouclier) contrebalancées par une force prodigieuse. Cependant, l’utilisation de son grappin est une catastrophe, imprécise au possible, on se demande comment ça a pu passer les tests internes. Enfin, sachez que les trois personnages doivent être gérés en même temps à l’écran, avec un déplacement prenant en charge le trio, et il aurait pu se faire plus agréable. Tout cela ne brise pas le trip, mais nous laisse quelques regrets.
La durée de vie est aussi sujette à discussion, enfin en partie. Si vous lancez Greak : Memories of Azur avec l’envie de vous appliquer, c’est à dire en recherchant les objets cachés ou en faisant tout le nécessaire afin de les acheter aux marchands, alors vous en aurez pour une dizaine d’heures. Ce qui est tout à fait honnête pour ce genre d’expérience. Par contre, on pourra foncer droit au but et terminer le soft en moitié moins de temps. Aussi, on se demande pourquoi les développeurs n’ont pas pensé à un mode coopératif. Peut-être pour déjà assurer un solo solide, ce qui est une bonne chose. Mais cela aurait pu assurer un plus gros contenu. Enfin, peu de raisons nous poussent à y revenir, sauf la recherche du run le plus rapide. Techniquement, le titre se défend très, très bien. La 2D est somptueuse, féérique, bourrée de détails poussant à la contemplation. Les effets de lumière se font spectaculaires, et pas un seul ralentissement n’a été noté. Du très bel ouvrage, tout comme pour une bande originale accompagnant parfaitement l’action.