Gran Turismo 7 : direction les stands !
On va vous faire une confidence : la simple évocation de la licence Gran Turismo suffit à plonger votre humble serviteur dans un océan de bons souvenirs. Ah, cet été de 1997, passé non pas sur le sable trop brulant des plages mais devant la télé, sous le choc de ce qui était alors une révolution : une véritable simulation sur consoles, avec des centaines de voitures à débloquer et à améliorer. Ainsi qu’un petit côté RPG nous poussant à y investir des nuits entières. Et l’on ne vous parle même pas de GT 2, de son duo de CD, et d’autres opus tous plus orgasmiques les uns que les autres (sauf le cinquième, mais passons). Alors oui, avant même de débuter ce test, il faut préciser que l’on a une affinité particulière avec la série de Polyphony Digital, l’un des studios les plus emblématiques de Sony Interactive Entertainment. D’où notre grande attente autour de Gran Turismo 7, un épisode qui promettait de revenir aux bases, après un détour par le « e-Sportesque » Gran Turismo Sport. Seulement voilà, les graviers ne sont pas loin…
Après un Horizon : Forbidden West qui nous a passablement énervé, on attendait Gran Turismo 7 comme une sorte de messie. Car, entre nous, cela fait désormais un bail que l’on n’a pas eu le frisson « next gen ». Au point d’ailleurs de nous demander si les décisions de Sony, menant les exclusivités sur différents supports (la PlayStation 4, pour ne pas la citer), ne seraient pas contre-productives. Spoiler : elles le sont, mais passons. Au-delà d’un non-événement comme le rachat de Haven Studios, qui ne doit son image qu’à l’étrange renommée de Jade Raymond (dont les hauts faits sont, par exemple, d’avoir mené la Google Stadia à sa perte), le constructeur ne parvient toujours que sporadiquement à nous embarquer dans sa PlayStation 5. Les excellents Astro’s Playroom et Ratchet And Clank : Rift Apart commencent à faire figure d’exceptions, et mine de rien elle datent. Mais voilà, le passionné Kazunori Yamauchi arrivait pied au plancher, et avec lui tous les espoirs d’une communauté. C’était avant que l’on découvre un soft ayant fait le choix du surplace… sauf dans les micro-transactions.
Et pourtant, tout partait sur des chapeaux de roue : Gran Turismo 7 laisse de superbes premières impressions. Le générique du début transpire la passion de l’automobile par tous les pores, jusqu’à sa musique délicieusement nostalgico-guillerette, du plus bel effet. Autre excellente chose dans la prise en mains : on se remémore les bases de cette simulation en débutant immédiatement par un mode de jeu tout nouveau, tout beau : le Rallye musical. C’est assez intéressant et même courageux, car il s’agit en fait d’une course de style « atteint le point de contrôle avant la fin du timer, pour que celui-ci augmente », donc très arcade dans le principe. Et bien soutenu par une musique composée idéalement pour la rythmique d’un jeu de bagnoles. Mais avec des sensations simulation, du coup l’on reprend rapidement nos habitudes, tout en remarquant que oui, le nouveau jeu de Polyphony Digital va encore plus loin dans le comportement des voitures, et surtout de leur physique.
Après cette ouverture tout bonnement géniale, l’on débarque enfin dans ce qui a fait, et fera toujours l’intérêt premier d’un Gran Turismo : le mode GT. Patatras, c’est le début de la fin. Et elle est amère. Pour tout vous dire, votre humble testeur a quelques petits problèmes de connexion en ce moment, avec des sautes assez fréquentes. Cela sera réglé d’ici peu, mais pour l’instant cela impacte la pratique en ligne. Pas trop grave d’habitude, sauf que Gran Turismo 7 demande une connexion permanente pour son mode GT. Franchement, on a envie d’immédiatement saquer tous les softs qui utilisent ce recours, ça n’a aucun sens. Mais aller, accrochons-nous, et tout ça pour découvrir une mise en scène un peu moyennes, nous présentant différents endroits sur une map. Pas de monde ouvert à la Forza Horizon, non, mais on se déplace via un pointeur de souris entre le terrain des permis, le garage, le Café, etc. On va revenir sur tout ce contenu, mais on tique tout de même devant la pauvreté de cet emballage, pas du tout au niveau de ce qu’on attend d’un jeu PlayStation 5. C’est cool d’avoir de la diversité dans les personnages nous accompagnant : on a des hommes, des femmes, de toutes les couleurs. Mais si c’est pour obtenir autant de statisme dans la mise en scène, à quoi bon ?
Horreur, malheur : les micros-transactions apparaissent
Alors bon, on comprend que Gran Turismo 7 a fait le choix d’aller à l’essentiel, et de le faire bien. Grande et bonne nouvelle, la sensation de jouer à un RPG avec des voitures est de retour. Ceci grâce à ce sentiment d’évolution si typique de la licence. Ce dernier est disparate à cause d’une décision catastrophique que l’on abordera plus bas, mais il est tout de même bien souligné notamment par le retour en fanfare des permis. Comme avant, on passe donc ces épreuves afin de s’ouvrir les voies de nouvelles compétitions, et l’on y revient dans le but de décrocher l’or partout, ce qui reste récompensé par l’obtention de bagnoles. Et ce n’est évidemment pas tout. Afin de donner du sens aux différents championnats, Kazunori Yamauchi et son équipe a imaginé le concept du Café. En gros, c’est une sorte de panneau des quêtes, comme l’on peut trouver dans un Ys IX : Monstrum Nox par exemple. Ici, les missions prennent le doux nom de Menus, demandant par exemple de rassembler trois bolides bien précis, ou encore de réussir telle ou telle course. Rien de bien fameux dans les objectifs, cela manque clairement d’idées à de rares exceptions valant toute le coup de s’y plonger, mais on débloque tout de même pas mal de choses.
Aussi, on a droit à une jauge de collection, qui se remplira à chaque fois que vous obtenez une nouvelle voiture. Là encore, on est un peu déçu par le manque d’attrait autour du concept de gain de niveau. Ce n’est pas hyper utile en fait, mais les amateurs de hauts levels seront évidemment comblés. Voilà, on y est, c’est maintenant le moment d’aborder ce qui fait actuellement couler beaucoup d’encre. Et à raison. Oui, acheter des bagnoles, dans Gran Turismo 7, est une véritable tannée. Pas de par l’ergonomie des menus, ni même la difficulté du jeu, non. Mais parce que le soft ne nous récompense clairement pas assez en fin d’épreuve, en terme de crédits. On met des plombes à amasser le butin nécessaire pour simplement obtenir une petite Toyota de rien du tout. Jusqu’ici, on peut penser simplement à un souci d’équilibre, qui peut aisément être corrigé dans une mise à jour. Erreur. Le titre de Polyphony Digital, celui qui se devait de nous mener au firmament de la PlayStation 5, fait le choix des micros-transactions. Si gagner de la thune ingame est si difficile, c’est parce que Sony nous a concocté tout un joli tas de packs à acheter, cette fois-ci avec de l’argent bien réel. Les bras nous en tombent et pour ainsi dire, l’expérience ne s’en remet pas, au point que l’on a désormais du mal à relancer le jeu.
Sony Interactive Entertainment multiplie les décisions étranges, et même décevantes, soit. Mais Polyphony Digital, en vrais passionnés de l’automobile, aurait pu se lever contre cette volonté de nous faire raquer en plus d’un jeu déjà très cher en lui-même. Hélas, non seulement ce n’est pas le cas mais en plus Kazunori Yamauchi a affirmé que le modèle de Gran Turismo 7 ne changerait pas à l’avenir (on attend de voir devant la colère des joueurs actuellement exprimée). Les ventes, plutôt bonnes, peuvent lui donner raison sur le court terme, il n’en reste pas moins que cette septième itération prend une route dangereuse, comme en atteste l’énorme review bombing que se prend le titre sur Metacritic, devenant ainsi l’exclusivité PlayStation la plus mal notée. Et dans le soft, cela a-t-il du sens ? Eh bien aucun, le principe n’emmène que frustration et temps long, l’on désespère largement avant d’atteindre le 100%, et le plaisir que l’on ressentait pour cette pratique disparaît à grande vitesse. Qu’il paraît loin, le temps de l’inoubliable Gran Turismo 4, dont on prenait soin de débloquer toutes les voitures ! Rageant, certes, mais aussi inquiétant pour le futur de la console.
Agréable dans sa conduite, mais décevant sur trop de points
Et c’est d’autant plus dommage que le reste fonctionne plutôt bien. Oui, l’on ressent au mieux le poids des voitures, ou la moindre modification d’une pièce détachée (là aussi obtenue beaucoup trop longuement). Oui, Gran Turismo 7 est exemplaire dans les options d’aide, permettant aux nouveaux venus de rejoindre le train en marche. Et, bien entendu, elles sont toutes désactivables pour les habitués de la licence, ne vous en faites pas. Oui, on a déjà vu pire en terme d’intelligence artificielle, même si elle ne brille pas pour autant pour ses prises de décision. Mais voilà, tout cela a du mal à nous accrocher, tant on est percuté de plein fouet par cette très désagréable impression de n’être qu’un porte-monnaie vivant. Chaque victoire nous rappelle les micros-transactions. Chaque défaite se termine par… aïe, une déconnexion réseau, on ne peut plus jouer. Damned ! Et le fin du fin, c’est cette incroyable désactivation du jeu pendant plus de vingt-quatre heures. Eh oui, à cause d’un bug (là aussi, on va y revenir), les développeurs ont dû procéder à une mise à jour. Et comme le soft solo demande une connexion, vous voyez le topo : pas de mode GT pendant tout ce temps. Une aberration.
Malgré tout, l’on se doit donc de tenir compte des bonnes sensations de conduite, même si les collisions font toujours bien trop rebondissantes. Et les dégâts se font toujours aussi inexistants, c’est vraiment le point noir de la licence. Reste qu’avec tout ce qu’on débloque, la tonne de concessionnaires, et surtout cet aspect musée de l’automobile vraiment très réussit (c’est d’ailleurs la plus grande satisfaction du titre), l’on prend tout de même un peu plaisir. La durée de vie, entre le temps pour gagner des crédits, le grand nombre de courses (trente-quatre, en-dehors des variations, c’est vraiment costaud) et de voitures, est énorme. Ajoutons aussi tout le côté multijoueurs, avec tout ce qu’il faut de salons à créer, et d’options communautaires pour amateurs de réseaux sociaux. Si vous aimez laisser des likes, sur des photos ou des vidéos, vous serez ravis. Les autres, beaucoup moins. Autre bon point pour Gran Turismo 7, la DualSense est parfaitement utilisée, que ce soit avec les gâchettes ou les vibrations rendant parfaitement la moindre particularité du revêtement.
Pour terminer ce tour du propriétaire empreint de spleen, il faut aussi coucher quelques mots concernant la pure technique de Gran Turismo 7. Après de premières impressionnants vivifiantes, là aussi l’on a peu à peu sombré dans la déception. Pas que le jeu soit moche, loin de là. Les modèles 3D des voitures donnent le tournis tant ils sont précis, et le rendu des conditions climatiques frôle la perfection. Surtout, le mode ralenti et photo est une véritable orgie de moments cultes pour qui aime l’automobile, avec d’autant plus d’effets comme le renfort du ray tracing (la technologie la plus décevante sur current gen, à ce jour). Mais tout de même, ce n’est pas du tout la claque visuelle qu’on était en droit d’attendre. En cause, des environnements aux textures inégales, sans animations à part l’éternel hélicoptère, et surtout un grand nombre de bugs en tous genres. Par exemple, il nous est arrivé de devoir recommencer tout le permis A, parce que le soft n’avait pas lancé l’auto-save. Plus qu’énervant, ce désagrément a même faillit sonner le glas de notre test, mais on s’est accroché. Pour mieux vivre d’autres petites folies comme l’impossibilité de courir en pneus terre sur les circuits proposant ce revêtement… contrairement aux adversaires qui sont tous équipés. Bon aller, restons-en là, et espérons que cette expérience douloureuse évolue au fil des mois. Mais on est bien là face à une grande déception.