Double Dragon Gaiden : un retour courageux
Eh oui, je suis assez vieux pour avoir connu l’arrivée en France de Nintendo ou Sega, avec leurs premières consoles. Mieux (ou pire, c’est selon), je suis de ceux à avoir vécu l’épopée Amstrad, avec un CPC 6128 arrivé au sein du foyer lors d’une veillée de Noël 1988. Même si la plate-forme était alors déjà désuète, vous ne pouvez pas imaginer l’impact sur l’enfant de cinq ans qui, aujourd’hui, écrit ces lignes. Et avec cette énorme machine, une boite à chaussures. Dedans, une bonne centaine de disquettes, sans étiquettes. Il y a prescription, ce n’était pas très légal tout ça. Après avoir compris la logique de cet ordinateur, et surtout le fameux « run CAT », c’était une foule de jeux qui s’offraient à moi : Robocop, Le Cinquième Axe, Bomb Jack, Billy la Banlieue… et Double Dragon. Premier contact qui signa mes premiers amours avec le Beat’em all, et un infini respect pour cette licence. Alors, vous comprendrez mon engouement pour ce retour, en 2023, avec un Double Dragon Gaiden : Rise of the Dragons qui promettait une véritable mise à jour du genre.
Double Dragon Gaiden n’est clairement pas sorti de nulle part. Après les succès ravissant de Streets of Rage 4 et Teenage Mutant Ninja Turtles : Shredder’s Revenge (malgré des défauts pour chacun des deux), on sent un véritable intérêt à faire revenir les bonnes vieilles licences du passé. Double Dragon a déjà tenté le coup ces derniers temps, avec deux épisodes peu qualitatifs (Double Dragon Neon et Double Dragon 4), donc j’espérais de l’éditeur Modus Games un véritable redressement. Pour ce faire, l’entité a fait appel à Secret Base, un studio de développement basé à Singapour, et totalement inconnu pour ma part. Pas un bon signe pour certains, pour ma part c’était tout le contraire : on allait sans doute éviter les quelques facilités qui m’exaspéraient dans les jeux de Dotemu. Et pourtant, le scénario m’a un peu déçu : on dit adieu à la fille à sauver, et l’on découvre une sorte de chasse aux gangs dirigeants une New-York très typé 1980. Si l’on sent bien que le but était de ne plus utiliser la figure de la demoiselle en détresse, supposément incompatible à notre époque, l’on peut aussi se satisfaire, finalement, d’un scénario fun et jamais trop intrusif. Sous-titré en français, de surcroît !
Aller, entre nous on s’en fiche de l’histoire : ce qu’on attendait de Double Dragon Gaiden se situait surtout dans son gameplay, lequel promettait un véritable renouveau sous forme de Roguelite. Concrètement, on bastonne les quatre gangs, avec une liberté dans l’ordre, et l’on récolte des jetons, lesquels débloquent du contenu persistant : que ce soit dans le musée (artworks, musiques) ou des personnages à débloquer. Ce sont bien ces derniers qui forment la véritable courbe de progression tant appréciée dans le genre, avec au total treize combattants aux capacités différentes. Certains seront plus agiles, d’autres beaucoup plus forts mais handicapés par une vitesse moindre. C’est certes classique, mais cela permet de débuter une run avec la sensation que l’avatar gagne en possibilités. Les parties, justement, sont toutes différentes : en optant pour un gang à dévaster, les autres se renforcent et les niveaux se font de plus en plus difficiles. Autre mécanique attendue, celle des bonus récompensant la run en cours. Ils se s’achètent en fin de niveau contre des dollars glanés et, même si le jeu n’est pas ultra compliqué (on peut régler la difficulté, avec un impact sur le gain de jetons), ils font la différence en agissant soit sur différents aspects comme le vie ou la puissance des coups spéciaux. Tout cela fonctionne, mais il est indéniable que, pour un Roguelite, il manque sans doute une certaine épaisseur pour nous pousser à y revenir.
De la patate, malgré des mécaniques Roguelite trop timides
Le côté Roguelite, s’il est réussit dans la forme, est donc un peu léger dans le fond. Double Dragon Gaiden se récupère dans les mécaniques Beat’em all, le principal selon moi. Les fans de la licence retrouveront tout de suite leurs marques, avec des enchainement simples, des coups coups forts, faibles, spéciaux, l’utilisation d’armes, des prises, un saut (un peu lourd mais permettant une frappe bien utile). Bien entendu, le bestiaire exploite bien tout ça, jusque dans des boss parfois bien coriaces. Les véritables originalités, de ce côté, se situent dans le duo : on passe d’un personnage à l’autre, en ayant à l’esprit l’énergie du comparse mais aussi ses capacités. On a aussi les KO spéciaux, récompensant la bonne utilisation des attaques. Enfin, le cheminement se fait plus permissif, avec des moments où l’on prendra le temps d’explorer les environnements. Bon, on n’est pas non plus dans un jeu d’aventure, mais tout de même les joueurs sont récompensés. Enfin, il faut signaler la présence du multijoueur, passage incontournable au fun bien marqué.
Je ne peux que vous conseiller de ne pas opter pour une difficulté trop basse, car cela diminuera drastiquement une durée de vie déjà pas folichonne. Un run de Double Dragon Gaiden peut se faire en moins de deux heures. Débloquer l’entièreté du contenu, venir à bout des défis, bref atteindre le 100% est faisable en sept heures. La seule rejouabilité se fait grâce au multijoueur. Techniquement, le résultat est solide : c’est fluide et je n’ai relevé aucun bug. Par contre, la direction artistique peut prendre à contrepied les attentes des fans de la licence. Celle-ci, jusqu’ici ancrée dans une sorte de réalisme évidemment surjoué, laisse place à un rendu plus mignon des personnages, et des décors hyper colorés. Ce n’est pas moche, loin de là, mais il me semble que ça retire une partie de la personnalité de la série. L’ambiance sonore, elle, est une grande qualité du titre, avec des musiques entrainantes et des bruitages percutants.