Infinity Strash : un mal-aimé qui ne le mérite pas tout à fait
Annoncé voilà près de trois ans, puis disparu des radars, Infinity Strash : Dragon Quest The Adventure of Dai est l’exemple typique de cible privilégiée pour une presse vidéoludique totalement aux abois quand il s’agit d’aborder autre chose que des films interactifs de Sony. Ce qui est, d’ailleurs, assez étrange à la vue des qualités du soft que je vais aborder aujourd’hui, soit écrit en passant. Bref, ce titre, éminemment attendu pour qui est né avant les années 2000, s’est depuis longtemps attiré des regards moqueurs, des miniatures Youtube pleines de grimaces bien putassières. Mais, « en vrai », elle vaut quoi cette nouvelle sortie signée Square Enix ?
Un peu de contextualisation me parait nécessaire. Infinity Strash : Dragon Quest The Adventure of Dai est un spin off de la plus grande des licences J-RPG, Dragon Quest. Mais, à la différence des Dragon Quest Builders et autres Dragon Quest Treasures, le titre aujourd’hui testé s’appuie sur une œuvre transmédia devenue culte : le manga La Quête de Dai. Comment ça, vous ne connaissez pas ? Si je vous dis : « Fly, le plus grand des héros c’est Fly » ? Ah, là ça commence à titiller votre douce nostalgie, avec des odeurs de BN trempés dans du chocolat chaud et le Club Dorothée à fond à la télé. Avant même que l’on sache, en France, que ce manga (donc adapté en animé) était issu d’un jeu vidéo ultra-populaire au Japon, on en était passionné. C’est dire si les qualités de ce programme, sorte de pierre angulaire du shonen, étaient puissantes. La folie, c’est de se rendre compte que jamais, j’écris bien jamais, cette adaptation n’a elle-même été porté dans le domaine vidéoludique. Et je peux vous dire qu’on l’a fantasmé, ce mouvement vers les pixels ! Du coup, l’attente était aussi porteuse de pression car, si Square Enix se loupait, la déception se sentirait au centuple.
Et oui, j’ai ressenti une sorte de regret en jouant à Infinity Strash : Dragon Quest The Adventure of Dai. Principalement à cause de sa structure qui, il faut en convenir, manque de fun. On sent bel et bien que le développement fut difficile, et surtout pas du tout prioritaire au sein du studio. Dommage. Du coup, le soft ne se présente pas comme un J-RPG classique, que ce soit en monde semi-ouvert ou ouvert. Le cheminement de la campagne ressemble de manière évidente à un visual novel. Comprendre par là qu’on vivra la plupart des aventures de Dai sous forme de cinématiques, certes mises en scène mais globalement assez statiques dans les dialogues. Ces passages sont entrecoupées de phases de gameplay pas hyper engageantes, plutôt faciles (il existe différents modes, mais prenez de suite le plus difficile), et dont l’utilité est surtout de farmer de l’XP tout en rencontrant des boss iconiques. C’est clairement léger, surtout à cause d’un déséquilibre flagrant faisant tomber l’aventure dans l’interactivité. Alors certes, vous me direz que God of War Ragnarok faisait de même, avec cependant un peu plus d’artifices de gameplay. Pire, Final Fantasy XVI, lui aussi très typé film participatif, a pourtant reçu des louanges des mêmes qui, aujourd’hui, se plaignent. Mais bon, il est vrai qu’on aurait aimé avoir la destinée de Dai plus en mains.
Une structure problématique, mais des mécaniques intéressantes
Alors pourquoi je m’étonne de tels jugements outranciers ? Parce que Infinity Strash : Dragon Quest The Adventure of Dai dévoile ses subtilités, et même sa (petite) profondeur après avoir digéré la déception du mode scénarisé. Celui-ci s’organise donc à travers trois types de missions : les cinématiques (sic), les missions principales et des annexes. Le combat domine, avec un système très basique : chaque personnage (Dai, Popp, Maam et Hyunckel) a son style, un combo de trois coups (à sortir en rythme pour en augmenter la force), des magies, une forme évoluée afin d’augmenter la puissance globale et un coup ultime lié à une jauge divisée en trois parties. Tout ça, c’est de l’ordre du déjà-vu cent fois. Ce qui est plus intéressant, c’est le mode Sanctuaire. C’est lui qui justifie le caractère J-RPG de ce soft. Pour faire simple, les développeurs ont organisé l’aventure comme un réminiscence de ses actes. Il est donc question de souvenirs, lesquels prennent la forme de cartes à collectionner avec différents bonus (et malus), à faire évoluer grâce à un lieu. Donc le Sanctuaire, en fait un donjon aux étages aléatoires et nous imposant de le débuter, à chaque tentative, au niveau 1. C’est donc un pur Roguelite, avec ses gains sous forme de drops à garder en fin de partie si l’on rentre au bercail sans mourir. C’est ici que l’on prend du plaisir, et ce même si le manque de challenge du solo retire un peu d’intérêt à cette feature pourtant bien agréable.
Infinity Strash : Dragon Quest The Adventure of Dai n’est donc pas un authentique hit, mais c’est aussi loin d’être la seule daube décrite ici ou là. Mon seul véritable regret, c’est le manque de soin apporté au codex. J’attendais une véritable encyclopédie, avec force détails sur les personnages et l’univers. Las, on a juste une sorte de rassemblement des cinématique du jeu. Triste. Par contre, la durée de vie du soft est bien plus solide qu’espéré. Je craignais, à cause de certains, une expérience à peine longue de six heures. Ce que demande, en fait, la seule aventure scénarisée. Avec le sanctuaire, on monte très facilement au-dessus des cinquante heures. J’ajoute un endgame assez qualitatif avec un nouveau mode de difficulté qui justifie, finalement, le farming de cartes dans le sanctuaire. Techniquement, le résultat est assez inégal. Le chara-design est excellent, très fidèle au manga. Par contre, les décors se révèlent vides, et manquent cruellement d’animations, de vie. Clairement, on est sur un rendu de début PlayStation 4. La musique ne marque pas non plus les esprits, les quelques thèmes ayant du mal à souligner les situations épiques.