- Crusader Kings III
- Disponible sur : PlayStation 5, Xbox Series, PC
- Développé par : Paradox Development Studio
- Edité par : Paradox Interactive
- Sortie le : 29 mars 2022
- Genre : Jeu de stratégie
Crusader Kings III, la stratégie dans ce qu’elle a de plus grande
Paru en 2020 sur PC, Crusader Kings III a beaucoup et agréablement surpris dans le petit monde du jeu de stratégie. Si la licence, née en 2004 (et déjà éditée par Paradox Interactive), s’est de suite emparée d’une place de choix dans ce genre, il faut tout de même noter qu’elle a connu une véritable progression, donnant lieu à un second opus très respecté par les fans. Du coup, cette troisième itération était très surveillée, d’autant plus que le temps de développement fut assez long. Le soft a donc enchanté les amateurs, et voilà qu’il tente l’aventure sur consoles de nouvelle génération. Un exercice périlleux, notamment pour l’ergonomie à la manette, mais le résultat reste satisfaisant.
Crusader Kings III s’inscrit dans la grande Histoire, même si le scénario sera principalement écrit par les actes du joueur lui-même. Mais tout de même, on a une petite mise en bouche, sous forme de tutoriel, nous dessinant au moins l’ambiance dans laquelle le titre va vous plonger. Ces premiers instants se déroulent donc en Irlande, en l’an de grâce 1066. On y incarne un Duc désirant retrouver un peu de grandeur, en même temps que restaurer la réputation de son territoire. Certes, on ne jouera pas à ce soft pour son scénario, c’est entendu car le game design d’un wargame se doit de nous laisser seul maître de la partie, mais on remarque tout de même une volonté d’instaurer une ambiance médiévale assez sombre. Pas de la dark fantasy, entendons-nous bien, mais plutôt une tendance à souligner l’intensité dramatique de nos décisions. Et quand on sait qu’elles peuvent nous mener au game over, c’est bien vu. Sachez, au passage, que les textes sont disponibles en français, et bien heureusement car vous allez lire !
Crusader Kings III s’inscrit dans l’aile hardcore du jeu de stratégie. Il faut ici prévenir les nouveaux venus : certes, s’accrocher vous procurera, au final, beaucoup de plaisir. Mais il va falloir passer par une période d’apprentissage longue, et parfois douloureuse. Et ce même si la licence a tout de même mis un peu d’eau dans son vin. Rappelons qu’il s’agit d’un jeu de stratégie, à forte tendance RPG dans certaines mécaniques, vous demandant non seulement de faire prospérer votre territoire, mais surtout lui assurer une gouvernance par le biais de la lignée. En effet, si vous n’assurez pas une descendance solide, c’est le game over immédiat. Et, pour éviter cela, il y a tant à gérer que l’on peut presque décrire le titre comme étant tout aussi complexe qu’un 4X. Notamment la nouvelle jauge Stress, une idée ingénieuse permettant de matérialiser la cohérence de nos actions avec celle du caractère de notre avatar. Attention, donc à bien respecter celui-ci, sinon c’est sa personnalité qui changera et pourra devenir de plus en plus instable. Voilà, vous êtes au courant : se lancer dans cette expérience s’avère extrêmement chronophage, mais uniquement pour les joueurs ayant l’envie de s’investir.
La filiation au centre du game design
Pour ces fadas du jeu de stratégie, Crusader Kings III fait date, c’est évident. Dès la sélection de notre territoire, pouvant prendre place aussi bien en Europe qu’en Asie, ou dans une grande partie de l’Afrique, on sent que Paradoxe Interactive est allé au bout du principe. Ensuite, il faudra sélectionner une période historique (neuvième ou onzième siècle), un personnage qui l’est tout autant, et c’est parti… pour le grand inconnu. Comme le soft ne développe aucun scénario pré-acquis, les événements s’enchainent de manière toujours surprenante, demandant au joueur de toujours réagir en fonction du caractère de son avatar. Il faudra donc continuellement prendre en compte ses particularités, histoire de ne pas le voir craquer à la moindre adversité et plonger sa propre dynastie dans le néant. Guerre de Royaumes rivaux, épidémies faisant passer la COVID pour une petite toux bénigne, rien ne vous sera épargné et, surtout, tout survient à bon rythme. Par exemple, l’on a vécu une véritable trahison amoureuse d’une perfide compagne partie s’acoquiner avec un seigneur adverse. La traitresse partie, on pensait voir arriver le game over gros comme une maison. Mais c’était sans compter sur un mariage arrangé, avec la fille de l’ennemi du seigneur en question. Du coup, l’enfant né de cette union certes peu glorieuse mais salvatrice était particulièrement caractérisé, et avec une éducation bien dure, il fut un tyran craint de tous. Une partie mémorable, mais qui s’est achevée dans un véritable massacre guerrier.
Crusader Kings III offre bien des moments comme celui-ci, mais pour les vivre au mieux il faudra s’habituer à l’ergonomie. Les menus sont pourtant inattaquables : c’est clair, aéré, rendu agréable par des modélisations soignées. Surtout, beaucoup de choses se déroulent par le biais d’actions contextuelles apparaissant finement à l’écran durant la partie. Cela nous évite donc d’ouvrir des tonnes d’écrans pour rien. Aussi, la carte, très importante aussi bien dans la gestion que pour les guerres, est exemplairement jolie. C’est un vrai plaisir que de s’y référer, et c’est assez rare pour être souligné. Cependant, et sans trop de surprise, il est tout de même assez rude que de prendre en mains le soft avec un pad. La DualSense a beau être notre manette préférée, toutes consoles de tous les temps confondues, elle ne parvient pas à remplacer le combo souris-clavier. Tous les boutons sont mis à contribution, et les premières heures sont consacrées à la retenue, par cœur, de leurs actions. Bon, ça rentre avec la pratique, surtout que ça reste plutôt logique (les gâchettes R1 et R2 pour passer d’un onglet à l’autre, ça reste le top pour la stratégie sur consoles). Ceci écrit, on aurait apprécié une autre utilisation de la croix directionnelle, elle aussi dédiée à la navigation, tout comme le stick gauche. Alors oui, c’est chaotique dans les premiers instants et, plus grave, ça peut nous faire perdre du temps et, à cause de cela, faire échouer une partie. Mais tout de même, Paradoxe Interactive reste l’éditeur et développeur ayant trouvé le meilleur compromis, à ce jour.
Un titre potentiellement hyper chronophage
Comme nous l’avons écrit plus haut, Crusader Kings III est hyper chronophage. L’avatar gagne des points d’expérience, permettant de faire fleurir bien des arbres de compétence. Un aspect RPG donc, couplé avec une rejouabilité hors norme, et tout cela construit une durée de vie qui ne l’est pas moins. Impossible de la chiffrer : une partie peut durer des dizaines d’heures, et certains joueurs affichent plus de mille heures de jeu. Cette version embarque le DLC Garments of the Holy Roman Empire, un contenu à l’époque de pré-commande, uniquement cosmétique. Et la version physique, distribuée par les bons soins de Koch Media, embarque un petit poster, pour les collectionneurs. Techniquement, le soft se tient très bien : aucun ralentissements en vue, pas de bugs. Oui, cela manque un peu d’animation pendant les batailles, et les textures ne font pas du tout next gen. Mais c’est propre, et c’est tout ce qui compte dans ce genre de jeu. Enfin, la musique est absolument magnifique, bien épique et dans la tonalité des époques abordées. De quoi encore gâter une immersion de haute qualité.
Conclusion
Crusader Kings III est une sorte de petit miracle dans sa version consoles. Oui, le gros boulot d’interface, mené dès la sortie sur PC, a facilité ce portage. Mais tout de même, Paradox Interactive prouve encore une fois qu’il est le maître incontesté en la matière. Reste une ergonomie à la manette pas vraiment évidente à digérer, mais on s’y fait avec la pratique. L’expérience, sachez-le, ne s’offrira pas facilement : il faut batailler pour bien comprendre et maitriser toutes les mécaniques. D’ailleurs, on découvre encore des choses après des dizaines et des dizaines d’heures de jeu. Une durée de vie phénoménale donc, et un plaisir sans cesse renouvelé.