Squirrel With A Gun : du fun à toutes les branches
Si l’ultra-réalisme a longtemps été au centre des attentions non seulement de l’industrie vidéoludique mais aussi des joueurs, il semble qu’on soit (enfin) venu à bout de cette tendance. Preuve en est le récent succès d’Astro Bot, salvatrice bouffée d’air frais. Personnellement, rien ne fait plus jeu vidéo qu’un plombier à moustache sautant sur des tortues, ou qu’un hérisson bleu fonçant à vive allure. Le jeu vidéo, c’est aussi le joyeux délire, et pas que les TPS grisâtres. Car quand on veut voir la réalité, autant ouvrir la fenêtre et pas allumer la télé. Par contre, il n’y a que sur cette dernière que l’on peut incarner une chèvre anarcho-chaotique, ou un écureuil si agile qu’il peut se défendre à coups de flingues. Bon sang, que viens-je d’écrire ? Bah c’est le pitch de Squirrel With A Gun, l’une de mes coups de cœur bis de cette année 2024, aujourd’hui disponible en version physique grâce au distributeur Maximum Entertainment.
Squirrel With A Gun. Écureuil armé d’un flingue. Voilà ce qu’on appelle un titre-concept ! Alors, au-delà de ces mots pour les moins imagés, comment le jeune et minuscule studio Dee Dee Creation a-t-il pu justifier ce délire poilu ? Eh bien déjà sans passer par la case du scénario bêtement développé, ou trop prompte aux blagues «dudesques » devenues assez insupportables. Et ça c’est une bonne nouvelle ! Le joueur incarne un rongeur enfermé dans un laboratoire secret, sans doute victime d’expérimentations douteuses. Enfin « victime », c’est vite écrit car, bientôt, une sorte de Men in black croisé avec Mister Smith va débarquer dans notre salle et se rendre compte qu’il ne faut pas trop titiller notre écureuil : celui-ci s’empare du pistolet de l’humain et le descend. Libertad ! Désormais au grand air, notre agile et colérique avatar se retrouve en pleine ville dans le but de trouver des glands d’or et d’en finir avec deux humains appelés Papa et Maman. Voilà, c’est du grand n’importe quoi très agréable, avec pas mal de références jusqu’à des vidéos internet bien connues, et le tout traduit en français.
Vous le sentez à l’évocation de l’introduction dans le laboratoire secret, ce dernier est idéal pour installer les bases du gameplay. Rassurez-vous, cela ne prend que quelques minutes. Car, et c’est sans doute la grande force de Squirrel With A Gun, la prise en mains est immédiate, avec un gros focus sur le moteur physique, ce qui fait un point commun avec GOAT Simulator 3. Tout va se jouer dans votre capacité à imaginer des solutions liées à la maitrise de l’inertie, de ces bonds clairement lunaires, du recul des armes. L’avatar avance, saute, s’empare d’objets pour les balancer sur des ennemis ou autres personnages. Et, bien entendu, il canarde. Avec un simple flingue au départ, mais l’arsenal va évoluer avec, par exemple, un uzi ou un fusil à pompe. Dès lors, on pourra donc canarder les ennemis, mais aussi leur asséner une sorte de finish him au corps-à-corps quand ceux-là sont sonnés. Car non, la vie d’écureuil n’est pas toujours aisée, surtout quand le voisinage est aussi maboule que dans cette petite ville dans laquelle l’action se déroule.
Un concept délirant et plus malin qu’espéré
Squirrel With A Gun est, au-delà de son concept délirant, un vrai bon bac à sable, construit avec une certaine science du rythme. Son cheminement vous demande d’explorer chaque pâté de maison afin d’y dénicher les fameux glands, mais aussi d’autres petits secrets dont je tairais l’existence plus précise. Ces glands ouvrent l’accès au boss du quartier, et s’en défaire étend la zone accessible. Bien entendu, cette formule classique et bigrement efficace se développe, notamment grâce à l’intelligence d’un level design très aérien, poussant le joueur à maitriser le recul des armes afin d’atteindre certaines plates-formes autrement inaccessibles. On a donc une sensation de skill grandissant, que certains gains vont encore accentuer. Je pense à la voiture, que l’on débloque et qui rendra de fiers services notamment dans un parcours de skate. D’autres glands feront plus appel à votre sens de la déduction, avec des énigmes assez drôles. Je pense à ce barbecue à allumer, mais je n’en écris pas plus. Tout cela fonctionne, même si j’ai tout de même quelques retenues. La première concerne les combats de boss, trop difficiles et bordéliques. Ensuite, il est dommage que le soft propose des points d’observation (avec une référence rigolote à Assassin’s Creed), grâce auxquels on sait exactement où aller. Pas un radar, mais presque, alors que l’expérience aurait encore gagné à laisser du mystère dans l’exploration.
Squirrel With A Gun est un trip fendard, et le jeu a le bon goût de ne pas étirer la durée de vie plus que de raison. On peut le terminer en cinq heures, tandis que le 100% vous demandera le double. C’est amplement suffisant ici. Par contre, le rejouabilité est aux abonnées absentes, dommage. Techniquement, je suis assez partagé entre vraie bonne surprise et éléments plus problématiques. Tout d’abord, notre petit avatar poilu est à la fois très bien modélisé et animé. Ce n’est pas le cas des autres modèles 3D, mais c’est voulu. Et j’ai été très surpris par quelques effets vraiment beaux, comme une bonne utilisation du ray tracing. Et le moteur physique est indéniablement une réussite. Par contre, j’ai eu le droit à certains bugs de collision, et parfois assez gênant. Pas de quoi grogner trop fort, mais on les ressent. Enfin, la musique manque un peu de personnalité, ne colle pas toujours au concept du jeu.