La Nintendo 64 atteint le quart de siècle !
Cet article revient sur la genèse et la vie de la Nintendo 64 durant la seconde moitié des années 1990. Une console pleine de charme qui s’en est très bien sorti malgré le rouleau-compresseur PlayStation, grâce à une ludothèque variée et pleine de grands classiques. Une approche à la fois historique et thématique qui devrait rappeler de bons souvenirs à ceux qui s’y étaient essayés !
Date de sortie : 23 juin 1996 (Japon), 27 septembre 1996 (Amérique du Nord), 1er mars 1997 (Europe)
Fabricant : Nintendo
Génération de console : Cinquième
Nationalité : Japonaise
Unités vendues : 32,93 millions
Fin de production : 7 août 2007
Meilleur vente : Super Mario 64 (11,89 millions)
Les débuts de la Nintendo 64
Déjà 25 ans que la superbe Nintendo 64 arrivait au Japon avec la ferme intention de surpasser la Saturn et la PlayStation, disponibles depuis déjà un an et demi. Misant à l’époque encore fortement sur la puissance graphique, Nintendo entame une collaboration avec Silicon Graphics (responsable des effets spéciaux des films Terminator 2 et Jurassic Park) afin de développer une console 64 bits, argument utilisé pour vendre la console comme étant plus puissante que ses concurrentes 32 bits. D’abord connue sous les noms de code « Project Reality » puis « Ultra 64 », elle fait le choix de conserver le support cartouche suite à l’abandon de ses partenariats avec Sony et Philips, ainsi qu’à l’échec du Mega-CD et du Compact Disc Interactif. Cela la conforte dans l’idée que le CD-Rom ne constitue pas l’avenir malgré ses capacités de stockage bien supérieures.
Le 23 juin 1996, la Nintendo 64 arrive au Japon avec un line-up qui, comme sa grande sœur, privilégie la qualité à la quantité. Justifiant à lui seul l’achat de la console pour la modique somme de 25 000 yens, Super Mario 64 révolutionne la façon d’appréhender la 3D grâce à sa caméra dynamique contrôlable avec les boutons C de la manette, précurseurs du stick analogique droit. Le joystick central contraste quant à lui fortement avec la croix multidirectionnelle et annonce la volonté de Nintendo de se concentrer essentiellement sur des titres en full 3D. Outre le jeu de mah-jong Saikyō Habu Shōgi, Pilotwings 64 fait office de vitrine technique avec ses aéronefs contrôlables à trois-cent-soixante degrés. Le 29 septembre 1996, la Nintendo 64 débarque en Amérique du Nord pour 199 dollars avec Super Mario 64 et Pilotwings 64, Saikyō Habu Shōgi restant exclusif au Japon.
1996, l’essor de la cinquième génération de consoles
En attendant la sortie européenne, l’année 1996 se poursuit avec Wave Race 64, simulation de motomarine proposant des courses assez exigeantes où il est nécessaire de passer entre les balises pour ne pas être disqualifié. Portage du deuxième épisode de la saga phare de jeux de combat de Rareware originel de l’arcade, Killer Instinct Gold renoue avec les sensations du premier opus en apportant quatre nouveaux personnages, mais en comporte autant d’absents et propose un gameplay qui ne marque pas autant que pour le premier opus. Peu fournie en jeux du genre, la Nintendo 64 accueille tout de même sa propre version de Mortal Kombat Trilogy, compensant son casting réduit par une absence de chargements et par le personnage de Khameleon, qui alterne entre chacune des trois femmes ninjas de la saga. Pour Noël, Mario Kart 64 impressionne avec ses courses en trois dimensions, son multi jusqu’à quatre joueurs. Aussi, notons l’apparition de Donkey Kong et de Wario, venant remplacer Donkey Kong Junior et Koopa Troopa au casting.
Le 1er mars 1997, la Nintendo 64 foule enfin le sol européen avec Super Mario 64 et PilotWings 64, accompagnés de Star Wars Shadows of the Empire, Wayne Gretzky’s 3D Hockey et surtout de Turok Dinosaur Hunter. Il s’agit d’un jeu de tir à la première personne adapté de la bande dessinée éponyme de Rex Maxon, qui devient une franchise phare de la console. Il faut cependant attendre le 1er septembre de la même année pour une sortie officielle en France, au prix de 990 francs. Malgré de bonnes sorties régulières, le choix de conserver le support cartouche et l’immense succès de la PlayStation coûtent cher à la Nintendo 64. Elle voit alors plusieurs éditeurs tiers se tourner vers la concurrence, notamment Squaresoft et Enix. Cela explique pourquoi elle manque grandement de RPG : excepté Ogre Battle 64 et Hybrid Heaven, elle ne permet que quelques jeux d’action aventure, tels Mystical Ninja Starring Goemon et Holy Magic Century.
Un constructeur qui soutient fortement sa console
Nintendo peut heureusement compter sur ses licences phares pour soutenir sa console, à commencer par Mario qui se voit décliner en plusieurs séries. Outre Mario Tennis et Mario Golf qui effectuent un bon passage à la 3D, la Nintendo 64 se veut être la console de la convivialité avec de nombreux jeux multijoueur. Elle accueille ainsi les trois premiers Mario Party, qui se présentent comme une adaptation du Jeu de l’Oie. Chaque personnage lance un dé pour avancer, affronte les autres dans divers mini-jeux et utilise des objets afin d’obtenir le plus de pièces et d’étoiles possible. Successeur de Yoshi’s Island, Yoshi’s Story se révèle moins ambitieux que son prédécesseur avec une narration plus enfantine et des niveaux largement moins inspirés. Conservant lui aussi un gameplay en 2D, Paper Mario succède à Super Mario RPG avec des personnages fins comme des feuilles qui donnent un charme particulier au titre en plus de servir le gameplay.
Adulé par une immense communauté de fans, The Legend of Zelda Ocarina of Time est souvent cité comme le meilleur jeu de la Nintendo 64 pour son aventure dépaysante ayant marqué toute une génération, aux côtés d’un Majora’s Mask au concept audacieux. Et surtout bien plus sombre. Héritier de StarWing, Lylat Wars s’impose comme le premier jeu de la machine à disposer d’un système de vibrations grâce au Rumble Pak, pour des séquences de shoot spatial plus intenses que jamais. De son côté, F-Zero X sublime la formule de la course futuriste jusqu’à quatre joueurs grâce à une fluidité à toute épreuve. Kirby obtient également un nouvel épisode appelé The Crystal Shards, entièrement modélisé mais conservant une jouabilité en side scrolling. Alors en plein expansion, la saga Pokémon obtient pas moins de cinq épisodes sur Nintendo 64, dont deux avec des arènes où il est possible de faire combattre des créatures issues des cartouches Game Boy, un puzzle-game, un safari-photo et un jeu d’élevage utilisant un microphone qui reconnaît de nombreux mots prononcés. Grande absente suite aux ventes en demi-teinte de Super Metroid, Samus Aran apparaît néanmoins modélisée parmi le casting de l’étonnant Super Smash Bros, jeu de combat particulier dans lequel douze figures emblématiques de Nintendo s’affrontent dans des arènes à l’effigie de leurs licences.
Rareware, un allié essentiel
Si plusieurs studio ont préféré la PlayStation, l’un d’eux reste étroitement lié à Nintendo pour ses nombreux jeux sortis depuis 1987. Le studio britannique Rareware étoffe en effet considérablement la ludothèque Nintendo 64 avec pas moins d’onze titres parus sur la machine, à commencer par Killer Instinct Gold déjà évoqué. Premier titre impossible à faire tourner sans la puissance octroyée par l’Expansion Pak, Donkey Kong 64 constitue un passage à la 3D remarqué pour le célèbre gorille, aux côtés d’un Diddy Kong Racing surfant sur le concept de Mario Kart, avec un univers moins inspiré et une jouabilité bien plus perfectible. Outre les plus confidentiels Blast Corps et Mickey’s Speedway USA, Rare est notamment connu pour ses ténors de la plateforme 3D Banjo-Kazooie et Banjo-Tooie, sans oublier le cultissime Conker’s Bad Fur Day, qui casse les codes habituels des consoles Nintendo avec des thématiques autour de la violence, du sexe, de l’alcool et de l’argent. Les jeux de shoot ne manquent pas à l’appel avec Jet Force Gemini, l’excellente adaptation du James Bond GoldenEye ainsi que son successeur Perfect Dark, dont le mode histoire fonctionne aussi avec l’Expansion Pak.
La plateforme 3D au cœur de l’expérience
Reine des jeux en full 3D, la Nintendo 64 s’est aussi illustrée à travers la version originale de Rayman 2, ou encore avec des jeux comme Paperboy et l’oppressant Shadow Man. La saga Bomberman n’est pas en reste avec pas moins de trois jeux (dont un jamais sorti en Europe) tandis que Castlevania ose le risque de la transposition en 3D après un renouvellement remarqué sur PlayStation avec le sublime Symphony of the Night. S’il ne fait pas l’unanimité à cause d’une caméra pas toujours docile (défaut courant des jeux de cette époque), quelques combats pénibles au fouet et un level design qui peut déconcerter, Castlevania 64 reste un bon jeu qui mérite totalement sa place dans la saga. Sa version ultime, Legacy of Darkness, améliore encore sa fluidité et propose deux nouveaux scénarios avec quelques séquences et niveaux inédits. Outre les ratages qu’a pu connaître la console avec des jeux comme Earthworm Jim 3D et Superman 64, certains optaient toujours pour un gameplay en 2D : c’est le cas de Mischief Makers, de l’illustre compagnie Treasure, également derrière le shoot’em up Bangai-O et le rail shooter Sin and Punishment, tout deux exclusifs au Japon.
La Nintendo 64, une console riche en shoots…
La Nintendo 64 est tout aussi connue pour ses nombreux FPS de qualité, à commencer par la saga Turok, qui ne compte pas moins de quatre épisodes sur la machine. Outre les jeux Rareware déjà mentionnés, la console comporte une version du Monde ne Suffit pas différente de celle sortie sur PlayStation, avec un mode multijoueur appréciable. Faisant partie des quelques jeux à la fois sortis sur Saturn, PlayStation et Nintendo 64, Duke Nukem 3D fait une apparition remarquée, accompagné d’un épisode inédit appelé Duke Nukem Zero Hour. Fait amusant : si la Saturn possède uniquement le premier Quake et la PlayStation le deuxième, la Nintendo 64 peut se targuer d’avoir les deux dans sa ludothèque. En plus du Doom 64 inédit qui signe un bon compromis entre les premiers épisodes et le futur Doom 3, on trouve un jeu d’aventure en vue subjective nommé Shadowgate 64, ainsi que le TPS Operation WinBack, qui utilisait déjà un système de couverture.
Mais aussi amatrice de courses !
Finalement assez riche dans la variété des genres, la Nintendo 64 comporte également un certain nombre de jeux de course flirtant parfois avec le sport. En dehors des jeux déjà précités, on retient surtout le jeu de glisse 1080° Snowboarding, les jeux de moto futuriste Extreme-G et même un nouvel épisode pour la saga Excitebike, que l’on pensait enterrée en 1984. Moins connus mais sûrement pas déplaisants, Beetle Adventure Racing propose un mix original entre course et aventure en plus d’un mode arène à la Mario Kart, tandis que World Driver Championship s’impose comme une bonne alternative à Gran Turismo. On retrouve d’ailleurs des licences emblématiques de la PlayStation avec les non pas moins sympathiques WipEout 64 et Ridge Racer 64, tandis que Micro Machines V3 s’invite sur Nintendo 64 sous le nom de Micro Machines 64 Turbo.
D’inévitables jeux en commun avec la concurrence
La Nintendo 64 comporte aussi plusieurs jeux en commun avec ses concurrentes, en particulier avec la PlayStation. On trouve de la plate-forme avec Gex Enter the Gecko et Gex Deep Cover Gecko, de l’action / versus fighting avec Mortal Kombat Mythologies et Mortal Kombat 4, du puzzle-game avec Bust-A-Move 2 et 3, du sport de glisse grâce à l’emblématique Tony Hawk’s Skateboarding et même de l’athlétisme jouable à quatre avec International Track & Field Summer Games. Une des plus grandes prouesses reste celle de l’excellent Resident Evil 2, qui propose une jouabilité assouplie, de nombreux documents inédits et des cinématiques en images de synthèse entièrement conservées grâce à des puces qui augmentent le stockage de la cartouche. C’est le début d’une certaine mainmise de Nintendo sur la licence de Capcom, le futur Resident Evil Zero ayant commencé son développement sur Nintendo 64 avant d’être entièrement retravaillé pour la génération suivante. Tout comme Eternal Darkness, curiosité hybride entre survival horror, ambiance lovecraftienne et aventure sur différentes époques, qui sortira finalement sur Game Cube.
Cette dernière arrivant le 14 septembre 2001 au Japon, la fin de vie de la Nintendo 64 est marquée par quelques sorties cette même année. À commencer par Conker’s Bad Fur Day, mais aussi le méconnu Doctor Mario 64 et le tout premier Animal Crossing, porté ensuite sur Game Cube. Des jeux comme Tony Hawk’s Pro Skater 2 sortaient encore en Occident, tandis que Tony Hawk’s Pro Skater 3 arrivait même le 20 août 2002 en exclusivité américaine. Avec près de 33 millions de consoles vendues, la Nintendo 64 a indéniablement marqué la cinquième génération de consoles grâce à sa ludothèque de grande qualité. Même si elle reste à mille lieues des prouesses de la PlayStation, elle possède une identité forte et marque le début d’une série de consoles essentiellement soutenues par les équipes même de Nintendo, notamment à travers les séries dérivées de Mario.