Resident Evil 4 Remake, l’original peut se rhabiller
Je vais vous faire une confidence : je n’ai pas été hyper emballé par l’annonce du remake de Resident Evil 4. Tout d’abord, parce que j’espérais plus celui de Code Veronica, jeu qui m’a particulièrement marqué sur Dreamcast. Voire même celui du sous-coté épisode Zero, certes récemment revenu en HD mais superficiellement. Aller, soyons fou, pourquoi pas le retour des deux softs parus sur Wii, des rails shooters particulièrement énervés et malheureusement passés inaperçus. RE 4 me paraissait encore trop frais, étrangement, et surtout trop fait et refait sur de multiples supports. Ensuite, il faut bien avouer que le remake de Resident Evil 3 était bon, mais pas tout à fait à la hauteur des attentes, beaucoup trop court, porté sur l’action et annulant certains des passages les plus iconiques du titre originel. Alors, comment Capcom s’en tire avec cette nouvelle tentative ? Je ne veux pas tuer le suspens, mais c’est un bijou…
Pas besoin de revenir longuement sur le développement du Resident Evil 4 de 2005, ce dernier aillant fait l’objet de centaines d’articles, de livres, etc. Sachez simplement que le projet de Shinji Mikami (aujourd’hui en partance de chez Tango Gameworks) fut pour le moins rocambolesque, avec des versions annulées, transformées en d’autres softs (Devil May Cry), redémarrées de zéro. Ce fut clairement un miracle que de voir sortir cette suite, et encore plus de savourer ce qui fut, pour moi, le meilleur jeu de la Game Cube. et pourtant, la prise de risque de Capcom était maximale : un changement de tonalité radical, aussi bien du côté de l’histoire, de l’atmosphère, que du gameplay. Avec du recul, et à mon plus grand regret tant je préfère les deux premiers opus, il s’agit clairement de l’épisode le plus apte à plaire à la jeune génération. C’était guerrier, over the top, les références dépassaient le seul film de zombie pour même aller vers la fantasy. Ce remake, et son immense succès dans les charts, confirme ce que je pensais indéniable : les développeurs avaient à disposition de quoi séduire au-delà des fans de la licence.
Mais encore fallait-il que tout ce potentiel soit à a fois respecté et bousculé. La réussite d’un remake passe par un équilibre entre ces deux extrémités, ce qui rend l’exercice particulièrement délicat (et souvent raté). Capcom semble avoir tout compris, et le prouve tout d’abord en gérant intelligemment le scénario. Clairement pas l’une des plus grande force de l’original, parfois un peu trop longuet et généreusement foutraque, le récit devient ici beaucoup plus puissant, cohérent… et même sombre. Les bases sont toujours les mêmes : l’action se déroule en 2004, quelques années après les événements de Raccoon City et la chute d’Umbrella Corps. Ce postulat bousculait les fans (dont je fais partie), tant l’entité diabolique était associée à l’esprit RE. Resident Evil 4 Remake, tout comme l’original, introduit une nouvelle menace. Celle-ci vient d’Espagne, où Ashey, la fille du Président des Etats-Unis, a été enlevé. Envoyé sur place, Leon Kennedy va découvrir que ce kidnapping est commandité par un certain Osmund Saddler, chef suprême d’une secte appelée Los Illuminados. Et ses ouailles ne sont pas de simples maboules : ils sont tous sous l’emprise d’un mystérieux parasite, appelé Las Plagas, et ce dernier prive son hôte de tout libre-arbitre, et le transforme en une sorte de zombie hyper-actif. Oui, on dit au-revoir aux morts-vivants à la Romero, pour retrouver une menace plus proche de ce qu’on a vu dans un 28 Jours Plus Tard.
Alors qu’il vient de débuter sa mission, Leon est capturé assez de temps pour qu’on lui inocule le parasite, ce qui va ajouter à l’urgence de la situation, et lui donner des aspects de course effrénée vers l’avant. C’est l’un des éléments qui m’avaient le plus marqué en 2005, il est ici de retour : cette impression de toujours avancer, contrairement aux allers et retours dans Raccon City, mais tout en gardant une certaine largesse dans le level design. Ainsi, on progresse sans sentiment de linéarité, ce qui solidifie le fun de l’expérience. Resident Evil 4 Remake va encore plus loin dans ce domaine. Non seulement l’on rencontre encore pas mal de personnages secondaires (Ada, Luis, et bien entendu Ashley), mais on a surtout droit à une écriture plus précise dans les relations entre tout ce beau monde. Surtout, Leon n’est plus une coquille presque vide, son évolution est plus précisée notamment grâce à son rapport avec Jack Krauser. Lequel, d’ailleurs, fait totalement référence à l’Opération Javier, et donc à l’opus The Darkside Chronicles. Voilà typiquement ce que j’attendais de cette parution : être jouable par n’importe qui (le scénario peut très bien être suivi sans connaître parfaitement la licence), mais aussi approfondir le cheminement avec l’immense lore à disposition. Et tout cela évidemment sous-titré en français avec le plus grand soin.
Le cheminement de Leon prend plus aux tripes, et c’est aussi grâce à une meilleure maitrise des trois phases du jeu. Tout comme l’original, Resident Evil 4 Remake va vous projeter dans trois grands environnements différents, lesquels seront évidemment aptes à varier leurs propres passages. Et cette fois-ci, je n’ai pas ressenti cette énorme baisse de régime en sortant du château. Je ne dévoilerai rien de ce qui se passe dans le dernier tiers, mais sachez que c’est plus condensé, ça part moins dans tous les sens (surtout à l’occasion d’un certain combat…), et finalement on ressent presque autant de frayeur dans tous les chapitres. Oui, l’action est bien plus au centre de la toute fin, mais non sans quelques moments vraiment flippants. D’ailleurs, c’est une constante dans ce RE 4 version 2023 : tout m’a paru faire beaucoup plus peur, avec des passages bien plus typés survival horror. Ah, cet horrible ennemi à passer sous l’azote… brrrr. Et ce n’était pas gagné, je rappelle que le soft vous propulse donc aux commande d’un Leon bien plus costaud qu’auparavant, avec une caméra à l’épaule qui a depuis été pompé dans tous les grands TPS (God of War, Dead Space, etc), des mouvements plus agressifs, bien plus d’armes à feu, etc. Le feeling du gameplay s’adapte à la vivacité des ennemis et, bonne nouvelle, Capcom a même perfectionné tout ça.
Le mètre étalon de ce que doit être un remake
Resident Evil 4 Remake est sans aucun doute l’itération la plus agréable à prendre en mains, au sein d’une licence pourtant très solide en la matière. Tout a été amélioré, à commencé par la possibilité de se déplacer en visant. Enfin ! Autre énorme avancée, la roue de sélection d’armes, permettant de changer de flingue à la volée. C’est une véritable révolution par rapport à l’itération d’origine, ça apporte énormément d’énergie aux combats. Ceux-ci restent d’ailleurs hypers jouissifs, avec autant d’importance pour la gestion de la distance que du corps-à-corps. J’ai pris énormément de plaisir, tout du long, à tirer sur un parasité pour le déséquilibrer, avant de foncer sur lui pour asséner un énorme coup de pied la plupart du temps mortel. Avec le temps, on pourra obtenir de nouvelles armes (fusils, mitrailleuses, flingue, magnum, fusil à pompe, sniper, lance-roquette), principalement auprès du fameux marchand, ici de retour. Et un peu plus bavard qu’en 2005. C’est donc le retour du système monétaire, de l’argent à looter que ce soit sur les cadavres ou dans des éléments destructibles. Ceux-ci, d’ailleurs, se briseront dorénavant à la main. Et c’est tant mieux, car le couteau, autrefois sur-utilisé, est désormais limité. Chaque utilisation le dégrade, et il faudra le réparer toujours chez le marchand. S’occupe-t-il toujours de l’amélioration des armes ? Oui, bien entendu, et la sensation d’évolution est idéale.
D’autres choses viennent encore étoffer le gameplay, mais je vous en laisse l’entier plaisir de la découverte. Un dernier élément se doit tout de même de vous être assuré : Ashley est bien moins lourdingue qu’auparavant. Je pense surtout à une certaine séquence, dans une salle des eaux qui m’a fait faire des cauchemars en 2005. Dix-huit ans plus tard, cette phase est très largement améliorée, plus jouable. Ouf ! Un autre de mes intérêt concernait la durée de vie de Resident Evil 4 Remake, et surtout son contenu. Attendez-vous à un résultat titanesque. Capcom a ajouté quelques missions secondaires, histoire de gagner des cristaux à échanger contre certains objets (dont des cartes dévoilant l’emplacement des trésors, ceux-ci faisant leur grand retour). Elles ne sont pas écrites, il s’agit simplement de petits objectifs bonus, comme tuer des rats, des ennemis spéciaux, ou encore de dégommer des médaillons bleus. Cela ajoute tout de même à l’expérience, tandis que le cheminement vous demandera vingt bonnes heures de jeu… en mode de difficulté Standard. Il existe aussi des modes Facile et Difficile. Surtout, terminer le jeu ouvre la voie non seulement à un new game plus permettant de garder armes, objets et améliorations, mais aussi un nouveau challenge intitulé Professionnel. Là, les sauvegardes automatiques n’existent plus, les ennemis sont déchainés, et surtout les énigmes sont renouvelées. J’ajoute le retour du stand de tir (avec un nouveau système de gacha), et des défis à remplir pour obtenir des points débloquant des bonus (artworks, modèles 3D, et même armes), pour obtenir une durée de vie incroyablement solide d’au moins soixante heures. Et je n’aborde même pas le mode Mercenaries, récemment ajouté mais que je n’ai pas encore eu le temps de vraiment tester.
Qui dit remake dit évidemment technique mise au goût du jour, et c’est bien le cas pour ce Resident Evil 4. Le RE Engine est désormais bien maitrisé, et les joueurs attentifs remarqueront des objets issus d’autres jeux utilisant ce moteur (comme le panier à fruits pourris). Du coup, toutes les qualités visuelles des précédents remakes et opus canoniques sont ici de retour, avec en premier lieu des effets de lumière à couper le souffle. Particulièrement utile pour créer des ambiances glauques à souhait, et croyez moi vous allez en découvrir. La distance d’affichage est aussi excellente, tout comme les animations. J’ai bien eu quelques petits bugs de collision avec certains ennemis, un ou deux sont restés planté dans le décor, mais très rarement. Tous les modèles 3D sont de pures réussites, notamment celui de Ashley, bien plus agréable aujourd’hui. Aussi, je n’ai rencontré aucun problèmes avec le framerate, mis à part (et étrangement) lors des crédits de fin. Enfin, la musique est exemplaire : elle reprend les thèmes d’origine et les sublime. C’est particulièrement le cas pour le château, plus que jamais inquiétant.